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L’opium football au secours de l’église pour abrutir l’Afrique ?

La création des académies de football en Afrique, suggérée par Arsène Venger de la FIFA, n’est pas forcément le meilleur moyen du développement du sport sur le continent, encore moins, du développement tout court. 

Le football, c’est beau quand des équipes de bons joueurs s’affrontent et que les stades sont remplis de supporters et spectateurs enthousiastes et passionnés. La joie est dans les cœurs. Le spectacle est beau, les joueurs gagnent beaucoup d’argent ainsi que leurs encadreurs et des entreprises s’offrent de la visibilité. Toutes choses qui font du football comme tous les sports, collectifs comme individuels, une véritable industrie moderne dans le sens de la recherche de profit. 

Le continent africain et l’Amérique du Sud en constituent le berceau du talent mais l’Europe occidentale qui en est l’inventeur s’est imposé comme  « l’industrialisateur ».

 En Afrique où nous ne pratiquons pas le professionnalisme, seul le génie de quelques jeunes sortis des quartiers et des établissements scolaires s’imposent dans des clubs en Europe. Ils seront affranchis de la misère et connaîtront la belle vie comme leurs collègues.

 Depuis le 11 février, le soir où les lampions se sont éteints sur la 34ème édition de la Coupe d’Afrique des Nations, la presse internationale et les blogueurs, influenceurs, dont certains auraient perçu beaucoup d’argent pour ça, n’arrêtent pas de chanter la performance de l’organisation en Côte d’Ivoire et la bonne affluence du public dans les stades. 

Savent-ils exactement ce que cela a coûté aux contribuables ivoiriens ? Savent-ils que le scandale du trafic des tickets avait pour objet d’enrichir les amis ? Il se murmure que la CAF aurait fait la meilleure recette de son histoire dans le remplissage des stades. Or on ne trouvait pas les tickets que des officiels politiques distribuaient à leurs partisans. Une vraie magouille. Et cette Côte d’Ivoire peinte de pacotille fait croire que tout va ici dans le meilleur des mondes. Bref, revenons à l’idée de monsieur Arsène Wenger. 

À première vue c’est bien pensé, mais dans le fond il faut craindre que cela ne soit un autre opium qui va avoir une influence sur la jeunesse et partant, sur la formation des élites de demain. 

Je sais, ma réflexion, un peu insolite, va susciter une levée de bouclier dans ce milieu de passionnés. Or tout ce qui passionne éloigne la raison. Il y a longtemps, les explorateurs colons sont venus nous aider à être fiers et heureux d’être pauvres ici-bas pour garantir une vie heureuse auprès de Dieu après la mort. Je ne rentrerai pas dans la polémique mais j’invite chacun de nous à faire l’état des lieux de la foi religieuse sur le continent.

Il y a quelques années, l’expérience de l’enseignement football et école de sol béni à Abidjan a suscité des vocations. Plusieurs écoles sont apparues avec des résultats mitigés. Certains enfants ont refusé le cursus classique pour exiger de leurs parents de les inscrire à l’école de football. Les fondateurs s’en sont mis plein les poches et certains ont utilisé les meilleurs élèves comme des produits d’exportation.

Une corporation d’agents de football est née pour repérer les footballeurs en herbes et les envoyer vers des clubs en Europe. Quand là-bas la qualité faiblit, bon nombre descendent en enfer. Sur place ceux qui n’ont pas réussi sont fondus dans la société avec leurs rêves brisés. 

L’initiative de la FIFA n’est pas forcément inappropriée mais ne doit pas fonctionner en parallèle de l’éducation nationale classique sous le prétexte de servir de creuset pour repêcher ceux qui ne réussissent pas dans le circuit scolaire. En son temps, pour cacher ses insuffisances en actions de développement, le maréchal Mobutu Séssé Séko Kukugbédu Wazenbaga, président du Congo qu’il a baptisé Zaïre, a développé le slogan : << heureux les peuples qui chantent et dansent >>.

Longtemps dans nos pays les temples et mosquées ont servi en endormir les nombreux fidèles invités à ne pas faire la politique et surtout à ne pas répondre à un appel à une marche de protestation. 

Pour nos gouvernements qui cherchent comment détourner l’attention des peuples ils sauteront sur l’offre comme du pain béni.  Pour une fois ils doivent répondre à cette main tendue de la FIFA dans les règles de l’art, c’est à dire en mettant dans le cahier de charges l’intérêt et l’avenir des enfants et des générations. Sinon cette opération qui va drainer des centaines de milliers d’enfants vers les stades de football n’aura que l’effet de plomber l’avenir, comme bien de congrégations religieuses le font inconsciemment si bien. 

Tous les jeunes veulent vivre comme leurs idoles qui se tapent les beautés de tous les continents, les voitures de luxe et des résidences acquises à des coûts dépassant l’entendement. C’est aussi le cas de toutes nos filles à la rondeur attirante et la poitrine haletante qui rêvent de partir en Europe pour des vocations de mannequin ou d’hôtesse de l’air. Ce n’est pas forcément la voie de la réussite.

L’initiative de la FIFA est un peu à l’allure de l’initiative de la France d’aider les africains francophones à rester dans leur pays.

Que ne feront pas les organisations européennes pour contrer l’immigration ? Si la création d’académie du football peut il n’y contribuer pourquoi pas. Ce sera la ruée vers les stades. Mais c’est une loi de la nature que parmi beaucoup d’appelés il en sortira peu d’élus. Les nombreux recalés vivront dans l’illusion de vedettes locales. Ils auraient pu être médecin, journaliste, ingénieur, infirmier, gendarme ou policier et autres. 

La religion est déjà l’opium des peuples noirs ; si le football y est ajouté, on pourra demander à Dieu de nous descendre le billet du retour. 

DOUMBÉ ZONGO. 

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